56 % des 50-64 ans ont soutenu un proche dépendant,
selon le sondage OpinionWay pour Le Figaro-Weber Shandwick. Ces aidants
familiaux ont aussi besoin d'être aidés.
La moitié des Français déclarent s'occuper ou
s'être déjà occupés d'un proche en perte d'autonomie. Pour la première
fois en France, un sondage
OpinionWay,
pour l'Observatoire de la santé Le Figaro-Weber Shandwick, dévoile
l'importance du phénomène des aidants familiaux sur un échantillon de
1010 personnes de 18 ans et plus. Selon cette enquête, les plus âgés
sont les plus concernés: 56 % des 50-64 ans et 71 % des plus de 65 ans
ont déjà aidé ou aident encore un proche dépendant. Cette question des
aidants familiaux est devenue un véritable problème de santé publique,
car, âgés eux-mêmes, et en l'absence de soutien, il leur arrive de
craquer à leur tour.
Après le travail (pour ceux qui sont encore
en activité), pour leur père ou leur mère, voire leur conjoint, ils
gèrent les courses, la cuisine, la conversation ; s'inquiètent de leur
santé, caressent leurs mains ridées, embrassent leurs joues fripées, par
devoir, reconnaissance, affection ou amour. Si le fait de soutenir son
père âgé ou sa mère n'est pas une curiosité sociologique récente, cette
activité a pris des proportions incroyables dans les pays riches où
l'espérance de vie progresse en permanence. Ce sont désormais des
seniors de 50, 60, voir 70 ans qui s'empressent autour de leurs parents
âgés, eux, de 80, 90, ou 100 ans, voire plus. Il y a aussi les conjoints
âgés des patients atteints de la
maladie d'Alzheimer, qui veillent sur eux, se mettant en péril sur le plan physique et psychique.
Dans
certains pays, l'aide aux aidants est institutionnalisée et pérennise
ce dispositif familial, qui soulage la collectivité d'un poids
important. En France, la question de l'aide aux aidants reste entière,
même si quelques municipalités conscientes de la problématique ont mis
en place des groupes d'échanges, des numéros verts pour des conseils,
voire d'autres modalités de soutien. À la lumière de cette enquête
exclusive pour
Le Figaro, il apparaît urgent de réfléchir aux
mesures à mettre en place pour aider ceux qui ont choisi d'accompagner
leurs proches parents dépendants.
Selon l'enquête d'OpinionWay,
ces aidants se font eux-mêmes aider dans les trois quarts des cas,
principalement par d'autres membres de la famille (36 %) ou par des
aidants professionnels (33 %) ; plus rarement par un établissement
spécialisé (19 %). Quand on demande quel type de soutien serait le plus
utile, ils citent à égalité le conseil auprès d'un réseau, d'une
association ou d'une structure publique (49 %) et la formation d'une
vingtaine d'heures. Seuls 10 % déclarent pouvoir se passer d'aide.
La
très grande majorité des Français (90 %) est également en attente de
soutien concret en cas de perte d'autonomie d'un proche, notamment
financier (42 %). Selon les personnes interrogées, les pathologies les
plus lourdes à gérer pour l'entourage sont la maladie d'Alzheimer ou de
Parkinson (85 %), les séquelles d'un
accident vasculaire cérébral (63 %).
En 2010, la Haute Autorité de santé recommandait un suivi régulier et
personnalisé des proches de patients atteints d'Alzheimer. Elle
soulignait notamment la nécessité d'une véritable organisation pour ces
soignants familiaux d'un genre particulier. Enfin, elle proposait de
manière explicite pour ces aidants familiaux la participation à des
groupes de soutien avec d'autres aidants, un support téléphonique ou par
Internet pour affronter des situations inédites ou des moments
difficiles, des cours de formation sur la maladie, éventuellement une
psychothérapie. «Une souffrance, des troubles anxieux, dépressifs ou
encore du sommeil peuvent apparaître», affirmaient les experts dans un
rapport consacré à ces questions.
Pour l'instant, la problématique
de l'aide aux aidants est encore avant tout un objet d'analyse et de
réflexion plutôt qu'un sujet pratique. «Dans un certain nombre de cas,
l'aidant est le conjoint âgé d'une personne souffrant de la maladie
d'Alzheimer, raconte le professeur Bruno Vellas (responsable du
gérotonpôle, Toulouse). Et là, le risque est grand pour l'aidant de
sombrer dans un syndrome de fragilité qui peut aboutir in fine à une
entrée dans la dépendance.» L'aidant devient très vite fatigable, perd
du poids, s'isole, ne sort plus, présente une fonte musculaire… «Les
personnes en bonne santé n'imaginent même pas le stress physique lié à
cette situation d'aidant, ajoute le docteur Jean-Philippe David
(gériatre, hôpital Émile Roux). Des études ont mis en évidence de
grandes perturbations biologiques chez ces personnes fragilisées. Il a
été démontré chez les aidants familiaux âgés une surmortalité par
rapport aux personnes de même âge n'ayant pas à gérer un proche
dépendant.» La question des aidants familiaux est devenue aussi un vrai
problème dans les entreprises: le taux d'absentéisme lié à la prise en
charge de ses parents âgés devient plus important que celui lié aux
enfants.
Prévention du «burn out»
Comment la société
peut-elle soutenir les familles pour qu'elles n'aient pas à en payer le
prix lourd, sur le plan physique, psychologique, sans parler de l'aspect
financier, loin d'être négligeable? «La France ne s'est pas tellement
organisée dans ce sens, malgré un certain nombre d'initiatives,
limitées, et plusieurs rapports, reconnaît le docteur Olivier de
Ladoucette (psychiatre-gériatre, Paris), Il faudrait développer par
exemple des structures relais qui prennent en charge le patient
dépendant pendant un laps de temps limité pour que les proches puissent
souffler, augmenter les accueils de jour, créer des maisons de
l'autonomie pour centraliser par exemple les informations et les
conseils pour les aidants…»
En Suède, certaines municipalités vont
même jusqu'à proposer aux aidants familiaux des week-ends à l'hôtel,
pendant qu'un professionnel les remplace à domicile pendant 48 heures.
L'idée est intéressante. Outre le repos et la prévention du «burn out»,
elle offre aux familles dévouées une véritable reconnaissance du soin
qu'elles apportent dans la tendresse à leur parent devenu dépendant.
source:
www.lefigaro.fr
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